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Ecrire de plaisir
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14 novembre 2009

billet fleuri

Il était une fois
Une fraise des bois
Qui un jour, s’admirant
Dans l’étang près de là
S’écria brusquement
“Vraiment, rien ne me va !
Ce rouge est exécrable,
Mon parfum si discret
Que j’ignore si j’en ai,
Et ma taille minable !
Vite, il faut tout changer !”
Son voisin champignon 
Tenta de l’apaiser :
“Votre rouge profond
Est des plus remarquables
Et rehausse à merveille
Votre forme admirable.
A nul autre pareil,
Votre subtil parfum
Si doux sans écœurer
Charme sans agresser.
Et votre taille, enfin
Mon amie, est parfaite
Pour se fondre au décor ;
Que voulez vous encore ?
La nature est bien faite
Et sait ce qui convient.
Elle a pourvu à tout.”
Mais elle ne veut rien
Entendre, et ses clameurs
Alertent un promeneur
Dans le bois attardé.
Il accourt, alléché,
La trouve sous les feuilles,
Sans coup férir la cueille
Et la gobe d’un coup !

MORALITE
Mieux vaut se contenter des atours dispensés
par Madame nature
Plutôt que de risquer un jour de se trouver
en fatale posture

Comme vous vous en doutez après cette petite poésie, c’est un billet « botanique » que je vous livre aujourd’hui, inspiré par une (toute petite, mais quand même) coïncidence amusante. D’abord, hier soir dans le roman policier « le chat qui avait un don », ( de la série de Lilian Jackson « Le chat qui… »), le héros Jim Qwilleran va visiter une demeure ancienne et il note la beauté du « jardin à la française, avec ses hémérocalles ». Ce nom ayant titillé la curieuse que je suis, j’ai cherché de quoi il pouvait bien s'agir : c’est une fleur de la famille des lys, son nom vient du grec kallos, beauté et hemera, jour, et signifie donc beauté du jour, nom amplement mérité comme vous pouvez en juger ci-dessous. On l’appelle aussi lys d’un jour car les fleurs ne dure pas plus de 24h, mais la floraison dure tout de même assez longtemps car les fleurs se renouvellent sans arrêt.

hemerocalle

Ensuite, aujourd’hui dans l’épisode de Miss Marple que diffusait la télévision on parlait à plusieurs reprises d’un mystérieux vieil oncle Henri qui s’avérait très utile à l’un des personnages. Et vers la fin de l’épisode on apprenait qu’il s’agissait, en fait, d’une plante, l’armoise, dont l’un des noms familiers est « old uncle Henry « . Mais on la surnomme également « Naughty man » (méchant homme) et « Sailor’s tobacco » (tabac du marin). De quoi faire froncer les sourcils à la déesse Artémis, dont l’armoise, à l’origine, tire son nom !

armoisecomune_1

Et vous, connaissez-vous des noms familiers étranges ou amusants pour des fleurs ou des plantes ?

Des noms des fleurs à leur langage il n’y a qu’un pas,  que je franchis immédiatement : l’armoise, pour commencer par elle, est symbole de fidélité et de constance amoureuse. De plus, on l’offre pour souhaiter la bonne santé à quelqu’un.
Restons dans le domaine amoureux : Selon Amandine Labarre dans son « Carnet féérique de l’herboriste » la calcédoine signifie fidélité à toute épreuve, l’anémone « innocente victime de la jalousie », la renoncule « vous brillez de mille attraits », œillet de poète « vous êtes un assemblage de perfection » et pour finir la bourrache « vous m’inspirez ».

Avant de vous quitter, voici une légende qui fait partie du livre « Histoires de la Forêt de Bercé » de Christian Pineau (Hachette, 1958). Je signale que la forêt de Bercé existe bel et bien (l’Hermitière dont il est question dans le conte en fait partie). Si un jour vous avez envie de vous y rendre, voici un petit plan, et quelques renseignements sur cette magnifique forêt, une des plus belles de France. Je les ai puisés sur le site www.ot-loir-et-berce.org

Plan_territoire2

« Bercé est l’un des vestiges de l’ancienne Forêt des Carnutes qui fût morcelée à l’époque de Jules César et de la conquête romaine.
Durant  la période féodale elle fût baptisée « Burcéium » qui, au fil du temps, devint « Bercé ».
La Forêt royale de Bercé, réorganisée en 1669 par Colbert, donnait des chênes de haute qualité, principalement utilisés en bois de marine; abattus, ils étaient transportés jusqu’à l’un des ports de flottage du Loir, Coëmont-Le Port Gauthier. Les radeaux descendaient ainsi jusqu’aux arsenaux du pays nantais. Les hêtres servaient à la saboterie ».

berc__1

Et maintenant, voici l’histoire...

La légende des violettes d’avril

Dans la forêt de Bercé, près des sources de l’Hermitière, vivait jadis une touffe de violettes.
C’était de minuscules violettes au cœur à peine teinté de jaune et dont les lapins, les lézards, les blondes abeilles et les oiseaux venaient, au lever du jour, respirer le parfum.
Après le grand éveil du printemps, chaque fleur, à son tour, perdit ses pétales, tandis que le pied, prêt à s’endormir dans la tiédeur du mois de mai, se garnissait de larges feuilles.
Une seule violette, plus tardive, gardait sa jeunesse, mais elle avait peine à émerger de la touffe épaisse ; nul passant pressé ne l’aurait aperçue, dissimulée dans tant d’ombre secrète.
Ce fut Colas le bourdon qui fut cause de son malheur. Un matin comme il se promenait dans les sous-bois, cherchant sottement à imiter les abeilles mais incapable de discerner les plus subtils parmi les sucs des fleurs, il voulut se reposer et s’installa, tout assourdi encore de son propre vrombissement, sur la touffe endormie. Il aperçut alors la violette.

« T’es ben mignonne – lui dit Colas. Qué donc que tu fais là seulette ?

- Tu le vois bien - répondit la violette ; je m’étiole, je m’ennuie, incapable que je suis de m’élever au-dessus de ces feuilles stupides. Je suis pourtant belle ; mais qui viendra, sans m’avoir aperçue, respirer le parfum de mon cœur ?

- Faut te débarrasser de ces feuilles !

- Comment faire ?

- Ecoute - dit Colas, je m’en vas aller quérir Aristide. C’est, pour sûr, le lapin le plus glouton de la forêt. Il te mangera cette broutille.

Le bourdon s’éleva, toutes ailes battantes, laissant la violette ivre d’espoir.
Quelques minutes plus tard, Aristide approchait de la touffe, ses yeux bleu pâle luisants de gourmandise.

- Fais attention ! cria la petite fleur, ne me mange pas !

Le lapin la rassura :

- Je ne mange jamais que les feuilles. Dans le pré autour de ma tanière se dressent les fleurs d’or des pissenlits au-dessus de leurs feuilles ravagées. J’aime les salades, pas les bouquets.

Aristide, avec précaution, dégusta toutes les feuilles qui cachaient la violette. Celle-ci, dès lors, se sentit enveloppée d’air et de lumière. Tirant toute la sève du pied qui n’avait plus qu’elle à nourrir, elle se mit à grandir ; bientôt sa taille devint le double de celle de ses sœurs défuntes.
Avec la hauteur, l’orgueil naquit en elle. Elle se sentait si fière de s’élever bien haut au-dessus des autres touffes qu’elle eût voulu se trouver seule au milieu d’un  chemin livrée à l’admiration des bêtes et des hommes de passage.
Les abeilles vinrent la féliciter de sa prestance. Les oiseaux voletant au-dessus d’elle piaillèrent d’admiration. Nora la couleuvre poète de la forêt, siffla pour elle ses stances les mieux tournées.
Mais cette félicité ne dura point. Avant que la violette se fanât à son tour, Chanterelle, la fée des chênes, vint à passer, assise en amazone sur son cerf favori. Elle aperçut la fleur solitaire joliment éclairée par un filet de soleil.
La fée des chênes, malgré les multiples qualités dont la nature l’avait parée, était quelque peu conformiste. Elle tenait à ses habitudes ; tout ce qui modifiait l’ordre immuable de sa forêt la surprenait et la choquait. (…)

« Qui t’a faite si grande ? » demanda-t-elle  à la violette, toute flattée de l’attention dont elle était l’objet.

- Moi-même, madame – répondit fièrement la fleur. Ne suis-je pas devenue plus belle que toutes mes sœurs de la forêt ?

Les sourcils charmants de la fée des chênes se froncèrent de colère.

- La plus belle peut-être, mais tu as perdu la qualité que doivent garder les violettes, le prix de leur parfum, la modestie. Je n’aime pas que soit changé l’ordre de la nature.

La fée souffla légèrement sur la fleur. Son haleine parut à la violette plus froide que tous les vents du Nord.
Les abeilles délaissèrent la touffe sans feuilles ; la fleur s’éteignit, délaissée, tandis que s’épanouissaient autour d’elle les muguets triomphants.

Depuis lors, plus tardives que les autres, fleurissent au mois d’avril de longues violettes, dont le parfum s’est envolé.
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Photo de flickr.com/photos/jieme74/475695835

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  • parce que j'aime lire et écrire et que, comme je l'ai découvert grâce aux ateliers d'écriture, c'est plus drôle à plusieurs. Parce que c'est passionnant de partager ce que l'on aime (ou pas) avec d'autres et de créer ainsi des liens.
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